#7 “Je veux qu’elle sache se défendre” — ou l’art d’enseigner la violence comme compétence sociale
Il y a une phrase qu’on entend de plus en plus souvent au portail de l’école :
« Moi je veux qu’elle sache se défendre. »
Sous-entendu : si on la tape, elle doit taper en retour.
Ça sonne fort, ça fait courageux, ça donne l’illusion d’élever une guerrière.
Mais on ne forme pas un enfant à l’autonomie relationnelle en lui apprenant la loi du talion à quatre ans.
On lui apprend juste ceci :
— Quand tu n’as pas les mots, tu frappes.
— Quand l’autre te frustre, tu le corriges.
— Et si tout le monde fait pareil, ça finira bien.
Spoiler : non, ça ne finit jamais bien. Ça finit dans le bureau du directeur.
Savoir se défendre ≠ rendre les coups
Se défendre, ce n’est pas :
augmenter le conflit,
prendre la place de l’agresseur,
valider la violence comme mode de communication.
Se défendre, c’est :
s’arrêter,
nommer,
prendre appui sur l’adulte,
se retirer du conflit,
tenir debout sans escalade.
Un enfant qui tape “pour se défendre” n’a pas appris à se défendre.
Il a appris à imiter l’agresseur.
Le message que le parent croit envoyer
« Je te rends fort. »
Le message que l’enfant entend
« Si quelqu’un ne fait pas ce que tu veux, tu peux taper. »
Et un jour, ce même parent — main sur la bouche — dira :
« Je ne comprends pas pourquoi il frappe autant ! »
Il y a quelque chose d’inversé en 2025
On exige de l’école qu’elle régule la violence, et on apprend chez soi à valider la vengeance.
On demande que les autres enfants ne frappent pas, tout en entraînant le sien à frapper correctement “en retour”.
C’est incohérent.
C’est éducativement dangereux.
Et c’est exactement comme ça que la violence se perpétue — pas qu’elle se résout.
Ce que “savoir se défendre” devrait vouloir dire
Être capable de faire autre chose que rendre les coups.
Parce que la maturité, ce n’est pas répondre comme un miroir,
c’est ne pas devenir ce qu’on subit.
Si vous voulez que votre enfant rentre avec toutes ses dents, dites-lui d’aller voir l’adulte.